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PARIS-BERLIN-MOSCOU ET L’EUROPE A 25

COMPTE-RENDU DU COLLOQUE PARIS-BERLIN-MOSCOU ET L’EUROPE A 25

                                                                      Par Marie IVANOFF  Professeur certifié de Philosophie

 

Les 4 et 5 juin 2004, les Associations DEMOCRATIES et Le PONT NEUF, en coopération avec le Centre Culturel de Russie à Paris et la Maison de Russie pour les Sciences et la Culture de Berlin, ont organisé le Colloque "PARIS-BERLIN-MOSCOU ET L’EUROPE A 25".

 

VENDREDI 4 JUIN 2004 CENTRE CULTUREL DE RUSSIE :

 

Ouverture du colloque "PARIS-BERLIN-MOSCOU ET L’EUROPE A 25"

M. Alexandre AVDEEV

Ambassadeur de la Fédération de Russie

 

Il n’y a pas d’alternative à l’approche multipolaire, au dialogue multilatéral et à la coopération Paris-Berlin-Moscou, facteur non conjoncturel qui pèse de plus en plus dans la politique internationale, face à la résolution des crises et des menaces mondiales. La condition préalable en est le respect de la primauté du Droit International ainsi que la perfection du système de l’ONU et de son Conseil de Sécurité. Le dialogue Paris-Berlin-Moscou contribue à la création d’une Europe multipolaire, sans ligne de partage, contre les anachronismes de la guerre froide.

Le récent sommet Russie-UE de Moscou, a permis la concertation sur la création des 4 espaces communs. L’espace politique de la Démocratie voit sa ligne déjà tracée par le Conseil de l’Europe et l’adaptation de la législation nationale aux standards européens. Les espaces de la Culture, de l’Enseignement et de la Recherche doivent être élaborés ensemble en tenant compte de la population russophone (plus d’un million en Estonie et en Lettonie). L’espace économique doit, grâce à la Constitution Européenne, voir s’ouvrir des perspectives supplémentaires pour un partenariat sur un pied d’égalité concernant des projets tels que les vols transsibériens, "La Dimension du Nord" ou les prix pour les porteurs d’énergie. L’espace de Sécurité Intérieure et Extérieure est l’œuvre de notre devoir commun, car le continent européen est toujours la cible des menaces et des défis du XXIème siècle. A la veille du sommet Russie UE, le problème de Kaliningrad était résolu à Moscou, après 4 ans de travail avec la Commission Européenne.

Cependant, la Commission Européenne n’est pas un partenaire facile, car elle manque de rapidité pour résoudre les problèmes qui surgissent dans ses relations avec la Russie L’organisation du Colloque Paris-Berlin-Moscou, permet donc les conditions d’un dialogue ainsi que les perspectives multipolaires et réciproques, pour la construction d’une Europe future démocratique, d’une Europe des partenaires.

 

PREMIERE TABLE RONDE

 

VERS UN PARTENARIAT PRIVILEGIE ENTRE LA RUSSIE ET L’UNION EUROPEENNE

Président de Séance : Vladimir POZDNIAKOV

Ministre-Conseiller de l’Ambassade de la Fédération de Russie en France

 

L’EUROPE A 25 ET LES RELATIONS AVEC LA RUSSIE

Pierre LEQUILLER

Député UMP des Yvelines, Président de la délégation pour l’Union Européenne a l’Assemblée Nationale

 

"Nous avons, l’Europe, la Russie, le devoir de prendre en main un certain nombre de problèmes sur la scène internationale, que les Etats-Unis à eux seuls, ne peuvent pas régler : on le voit dans le conflit du Proche-Orient. Mais il est vrai que nous n’avons pas la force militaire européenne qui est le bras armé de toute politique étrangère. C’est cela qu’il nous faut construire à toute vitesse…La conscience des peuples européens ressent très profondément le besoin de la construction de l’union politique de l’Europe, en relation très étroite avec la Russie, en relation évidemment avec les Etats-Unis, mais dans une relation transatlantique rééquilibrée."

 

ROLE DU TRIANGLE RUSSO-FRANCO-ALLEMAND DANS LE RENFORCEMENT DE LA SECURITE
 ET DE LA STABILITE EUROPEENNE ET INTERNATIONALE
.

Vladimir IVANOV

Ambassadeur, Directeur du Centre d’information et d’analyse du Ministère des Affaires Etrangères de la Fédération de Russie

 

Le futur agencement de l’Europe qui se constitue autour de la réadaptation de principes mis à la base de la sécurité européenne et internationale, doit nécessairement tenir compte de trois faits importants et nouveaux depuis le 1er Mai 2004 : une frontière commune entre la Russie et l’UE, l’augmentation jusqu’à 53% de leurs échanges économiques, et le problème du Million de "Non-Citoyens" russophones en Estonie et en Lettonie. La Troïka Russie-France-Allemagne a permis de supprimer le langage d’ultimatums adressé à la Russie jusqu’à présent. Son rôle s’impose :

-          dans le renforcement de la sécurité européenne en respectant le Droit International, le rôle central des Nations-Unis et du Conseil de Sécurité de l’ONU et par l’affirmation de l’auto-identification de la Grande Europe face à la volonté unipolaire des Etats-Unis.

-          dans la prévention des crises éventuelles entre la Russie et l’UE, grâce à la définition stratégique des convergences d’intérêts communs, grâce à la confrontation de la notion de Grande Europe intégrant la Russie, à celle d’UE la digérant plutôt : dans ce cas-là, la Russie pourrait-elle et voudrait-elle devenir membre de l’UE ?

-          dans la compréhension que l’accord de l’ECE ratifié par la Russie, l’Ukraine, le Belarus et le Kazakhstan, ne constitue pas un obstacle à la progression de ces Etats vers l’Europe, au contraire.

-          dans le fait qu’en matière de Droits de l’Homme, il n’y a pas deux poids et deux mesures : les mêmes règles doivent traiter le problème du terrorisme en Tchétchénie, le problème des "non-citoyens" russophones en Lettonie et en Estonie ainsi que l’affaire Youkos.

L’UE devrait élaborer une politique constructive commune vis-à-vis de la Russie pour dépasser les divergences. La mise en place des quatre espaces européens communs doivent en développer les feuilles de route. Seront-elles prêtes pour le prochain sommet de La Haye ?

 

Y A-T-IL UNE ALTERNATIVE A L’INTEGRATION DE LA RUSSIE A L’UNION EUROPEENNE ?

Anne de TINGUY

Chercheur au CNRS, Attachée au CERI, enseignante à l’IEP de Paris, directrice scientifique du Master "Etudes internationales"

Sciences Po-MGIMO à Moscou

 

La réponse à cette question est sans ambiguïté : la Russie n’a pas d’alternative à l’intégration à l’Europe et l’UE n’a pas d’alternative à chercher à ancrer la Russie à l’Europe. Cependant, malgré l’importance de ses partenariats avec la Communauté Euro-Atlantique, la Russie n’a pas placé l’intégration à l’Europe en tête de ses priorités, car se définissant comme un pays eurasiatique, elle accorde une très grande importance à ses relations avec les USA ainsi qu’avec la CEI.

1-       Il importe de rappeler deux points : Géographiquement, culturellement et économiquement, la Russie fait partie de l’Europe. Depuis Pierre le Grand, son européanité s’est davantage développée que son asiatisme. La diminution de la population sibérienne remet d’ailleurs en question la cohérence du territoire russe. Le deuxième point est que l’élargissement de l’Union Européenne, rend plus nécessaire encore qu’hier un approfondissement des relations russo-européennes afin d’éviter la marginalisation de la Russie.

2-       L’intégration de la Russie à l’UE ne signifie pas son adhésion à l’UE. C’est ce qu’explique Vladimir POUTINE en 1999 dans le texte "Stratégie du développement des relations de la
Russie avec l’UE pour 2000-2010". La Russie, autre pôle d’attraction du continent européen, puissance mondiale s’étendant sur deux continents, entend garder sa liberté afin de définir et de mener sa propre politique intérieure et extérieure et de préserver les avantages que lui confère le fait d’être un Etat eurasiatique et le pays le plus important de la CEI.".

La Russie, autre pôle du continent européen, voit se confirmer sa relation d’égale à égale avec l’UE, dans la création des quatre espaces communs ainsi que l’avancée de l’Allemagne comme premier partenaire commercial avec la Russie dans le monde. Aux liens bilatéraux, s’ajoute un dialogue Russie-UE, où le partenariat économique devient aussi politique et sécuritaire, institutionnalisé par l’APC en Décembre 1997, s’appuyant sur des sommets UE-Russie deux fois par an, des rencontres annuelles des membres du Parlement européen et de la Douma. Le 27 Avril 2004, le Conseil de Coopération existant s’est transformé en Conseil de Partenariat, et le 21 Mai 2004, lors du Sommet Russie-UE, des avancées ont concerné l’adhésion de la Russie à l’OMC. Le 6 Novembre 2003, un accord est conclu entre la Russie et Europol, lors du Sommet de Rome. Le 31 Mai 2003 à Saint-Pétersbourg, comme le 6 Novembre à Rome, la Russie et l’UE se sont affirmées "partenaires dans le domaine de la sécurité, de la gestion des crises et des relations internationales".

3-       La troisième dimension essentielle de la relation Russie-UE est celle de la mobilité, des échanges et des migrations au niveau des individus, depuis l’ouverture du rideau de fer, permettant ainsi la construction d’un espace européen.

Cependant la relation Russie-Europe demeure insuffisante et parfois décevante : "Nous devons reconnaître "avoue Chris PATTEN, Commissaire aux Relations Extérieures au Parlement Européen, le 26 Février 2004,"que Moscou et Bruxelles se comportent rarement comme des amis ou des partenaires".La construction d’un espace commun se heurte encore aujourd’hui à de sérieux obstacles. C’est "le respect des valeurs communes" qui permettra "de renforcer les progrès accomplis vers un partenariat stratégique", rappelle le Conseil Européen dans la Stratégie Européenne de Sécurité qu’il adopte le 12 Décembre 2003.

 

LE DEVELOPPEMENT DE LA COOPERATION MULTILATERALE ENTRE LA RUSSIE ET L’UNION EUROPEENNE ELARGIE.

Dr Heinz TIMMERMANN

Vice-Président de la Fondation "Science et Politique" de Berlin

 

Le partenariat entre la Russie et l’UE est accentué par le fait des 2200 kilomètres de frontières communes, ainsi que par les intérêts parallèles et complémentaires à la base des "espaces de globalités européennes", fondement du Traité de Partenariat de 1997. Cependant, des divergences croissantes sont apparues. Parmi les causes objectives, on relève des asymétries dans les systèmes économiques et politiques.

Parmi les causes subjectives, on note une conception différente du partenariat. Pour la Russie et ses intérêts, l’UE compte d’abord en tant que partenaire économique en vue de la modernisation. Par contre, l’UE est guidée certes par ses intérêts, mais surtout par les valeurs démocratiques communes. L’accent sur la modernisation pourrait mettre clairement en évidence que celle-ci ne peut réussir qu’au moment où la Russie se démocratisera. On pense ici surtout aux contrôles et à la transparence dans la vie politique et administrative, mais aussi dans le milieu militaire résistant aux réformes.

Pourtant la Russie a reconnu la Démocratie et les Droits de l’Homme dans les Traités bilatéraux, dans le Traité de Partenariat et de Coopération avec l’UE ainsi que par sa participation à l’OCDE et au Conseil de l’Europe. Ainsi, la collaboration dans les secteurs de la sécurité et de la défense contre les activités criminelles transfrontalières, constitue un préalable indispensable pour la circulation sans visa entre la Russie et l’UE, afin de s’opposer au traumatisme historique de la Russie séparée et oubliée de l’Europe : la convention russo-allemande constitue un projet pilote pour une plus grande ouverture des frontières entre la Russie et l’UE.

L’espace économique commun obtiendrait des impulsions nouvelles, si la Russie se décidait à utiliser l’euro au lieu du dollar.

Le domaine de l’énergie est considéré comme le moteur du partenariat entre l’UE et la Russie, dans les domaines du gaz naturel, du pétrole et de l’électricité. Ici, les intérêts sont complémentaires : la Russie possède les matières premières et a besoin de modernisation, l’Europe dispose de capitaux en vue du transfert de technologie. Pourtant la Russie refuse de signer la Charte sur l’énergie qui libéralise l’utilisation du réseau russe d’oléoducs et donc ainsi permet leur accès aux entreprises étrangères. La Russie voit les systèmes d’oléoducs dans l’espace de la CEI plutôt sous des aspects géopolitiques et géostratégiques, et insiste sur le besoin d’une influence prépondérante de l’Etat. Cela est apparu clairement dans l’affaire Khodorkovski.

De bonnes perspectives sont offertes par la proposition de la Russie de créer avec l’UE, une union pour l’énergie électrique, en tenant compte de la réciprocité de l’accès au marché, pour la sécurité du nucléaire.

Les relations de circulation et de télécommunications transeuropéennes devraient être développées à partir du projet de la construction d’une autoroute et d’une ligne de train à grande vitesse Paris-Berlin-Varsovie-Minsk-Moscou, afin de ne pas rejeter la Russie à la périphérie.

La coopération UE-Russie s’institutionnalise dans le Comité politique et de Sécurité politique. En cas de crises, la Russie a proposé d’apporter son aide avec du matériel de guerre là où l’UE ne dispose que de capacités insuffisantes. Un conseil de Sécurité pourrait être crée entre l’UE et la Russie, analogue au 2ème Conseil de l’OTAN, qui confèrerait à la Russie des droits de co-décision, par exemple dans certains domaines des missions de Petersberg. A la réunion de Saint-Pétersbourg de Mai 2003, l’UE et la Russie ont décidé de remplacer le conseil de coopération qui se tenait annuellement, par un conseil de partenariat permanent flexible : ainsi le problème de Kaliningrad après un engagement économique commun, s’est vu dénoué, au point d’en faire un exemple, dans le cadre régional, pour la coopération fonctionnant entre l’UE et la Russie. Il n’en va pas de même pour les relations entre Moscou et ses partenaires de la CEI, dont le monopole inquiète fortement l’UE.

Le bilan est que la vision d’un partenariat global est loin d’être encore la réalité. Cependant, du fait de sa grandeur, de sa proximité, de son utilité mais aussi de sa nuisance, de son rôle d’acteur régional et global, on a besoin de la Russie comme partenaire. Mais l’intégration de la Russie serait compromise si une nouvelle activation des tendances autoritaires allait à l’encontre des principes européens de la Démocratie. 

Cependant, encore faut-il que l’Union Européenne elle-même en préalable, se rende crédible et digne de ce paradigme des Droits de l’Homme et de cet idéal de Démocratie dont elle se vante, parfois, hélas, à tort, elle aussi ! (XXème siècle !).

 

AU MOMENT DE L’ELARGISSEMENT A L’EST DE L’UNION EUROPEENNE, LE "BON CHOIX" DU PARTENARIAT AVEC LA RUSSIE…ET SES DIFFICULTES.

André BELLEVILLE

Président de l’Union Nationale des Associations pour l’Amitié et la Coopération avec la Russie et la CEI,
Vice-Président du Comité Partenariat Europe Centrale et Orientale.

 

Depuis 1905, fondée à l’initiative d’Anatole France, perdure en France la tradition d’une activité associative d’amitié pour le Peuple Russe, dont la motivation en est l’Histoire et la Culture, permettant le dialogue au Siècle des Lumières, et enfin les besoins humains. Pendant le régime soviétique, c’est France-URSS qui assura cette amitié.

En cette date mémorable du 6 Juin 2004, les chefs d’Etat alliés se retrouvent côte à côte avec le Chancelier allemand. Saluons l’Association des échanges franco-allemands ou ceux de l’OFAJ, ainsi que les Amis de la France en Russie, dont le Président à Moscou, Ambassadeur permanent et plénipotentiaire de la Fédération de Russie, Youri Doubinine. La Russie peut nous aider à construire une Europe multipolaire, sauvant ses langues et ses cultures, en fonction de son partenariat et de son intégration.

Tout commande d’aller rapidement vers le respect des cultures et des langues, y compris celles des populations russophones des Pays Baltes, vers la circulation sans visa des Européens dans toute l’Europe, solution au problème de l’enclave de Kaliningrad. En effet, l’un des défis que nous avons à affronter aujourd’hui, est celui du terrorisme nourri de tous les intégrismes, danger moderne et le même partout, à New-York, à Moscou, à Madrid ou à Grozny. Dans ces cas-là, la solution militaire ne saurait suffire.

Deux grandes dates, celle du Débarquement venu de l’Atlantique après que le 1er espoir soit venu de Stalingrad et de l’Est – et celle de la Victoire dont nous fêterons l’an prochain, le 60ème anniversaire.

Je me permets de vous inviter à deux colloques : au Colloque du Mémorial de Caen, organisé par le Comité PECO – ainsi qu’en Mai 2005 à Evian, au Colloque organisé par notre Union Nationale France-Russie-CEI appuyée sur sa forte Association EURCASIA des Pays de Savoie. L’avenir de notre continent, son unité, peut faire évoluer la barbarie de la mondialisation du terrorisme dans le bon sens. C’est là notre grande responsabilité à tous.

 

 

COOPERATION RUSSO-FRANCO-ALLEMANDE, LES ASPECTS POLITIQUES.

Youri DOUBININE

Professeur de L’Institut d’Etat de Moscou des Relations Internationales, ancien Vice-Président des Affaires Etrangères et
 ancien Ambassadeur de l’URSS en France, Président des Amis de la France

 

Il faut tout comme M. l’Ambassadeur Vladimir IVANOV, rester très optimiste en ce qui concerne l’avenir de la Grande Europe dont rêvait le Général de GAULLE, et ceci pour deux raisons. La première raison est liée à la dimension humaine : en 1955, c’était le premier dégel, sept étudiants soviétiques étaient envoyés suivre les cours de français à la Sorbonne, dans un gros avion de grande ligne qui partait deux fois par semaine de Prague. Aujourd’hui, c’est avec un vol mixte franco-russe que des centaines de passagers font le trajet régulièrement. Les compagnies aériennes arrivent à peine à satisfaire ce mouvement réciproque et irréversible des peuples à se rencontrer en Europe.

Cet axe de coopération Paris-Berlin-Moscou est un événement historique, c’est déjà la création de la Grande Europe comme l’a démontré Monsieur AVDEEV, Ambassadeur de Russie, élément essentiel de la politique internationale.

Youri DOUBININE, Président de l’Association Russe "Les Amis de la France", ainsi que M. BELLEVILLE, Président de l’Association "Les Amis de la Russie" ont envoyé une déclaration commune à leurs Présidents pour créer "L’Union Européenne sans visa". Un effort de renforcement de l’enseignement des langues des trois pays doit être promu. Une convention européenne ou universelle doit être créée pour mettre à l’abri les expositions des chefs-d’œuvre russes ou autres de toute poursuite juridique en dehors des échanges eux-mêmes.

Ainsi, c’est l’intensité de la coopération russo-franco-allemande qui constituera un facteur puissant et positif de l’harmonisation des relations internationales dans le monde multipolaire contemporain.

 

DEUXIEME TABLE RONDE

 

LA RUSSIE ET L’EUROPEANISATION DE L’EDUCATION ET DE LA RECHERCHE

Président de Séance : Michel LESAGE

Professeur émérite à l’Université de Paris I

 

Une mise en situation dans cet espace commun de recherche et d’éducation a été envisagée au Sommet de Saint-Pétersbourg, en mai 2003. Lors de la rencontre au Sommet UE-Russie, le Président POUTINE a indiqué quels étaient les quatre coordinateurs pour chacun des domaines dont un point essentiel est celui de l’enseignement des langues. Madame POUTINE s’est exprimée ainsi, lors d’un colloque d’étudiants français et russes à Strasbourg : "l’apprentissage des langues abolit les barrières en Europe."

Les étudiants ont remis une lettre à Madame HAYGNERE, ministre français, déléguée aux Affaires Européennes, à l’intention du Président CHIRAC, le priant de contribuer au rayonnement de la langue russe en France et de la langue française en Russie, en vue de leur coopération économique et culturelle séculaire.

Une lettre analogue a été adressée au Président POUTINE.

 

LA RUSSIE ET L’EUROPE :"DIMENSION DU SUD"

Ramazan ABDOULATIPOV

Ancien Vice-Premier Ministre de la Fédération de Russie, Sénateur,

Membre du Comité chargé des Relations Internationales

du Conseil de la Fédération de Russie.

 

Le vecteur Russie-UE, et surtout le triangle Moscou-Paris-Berlin, constituent un aspect important de la politique internationale contemporaine. Cependant, il convient de partir du fait que la Russie fait partie intégrante de l’Europe malgré leur séparation provoquée et accusée en permanence par les textes et les discours. Pourtant la Russie et l’UE sont membres du Conseil de l’Europe et participent activement à son Assemblée parlementaire. L’énorme potentiel à la fois d’amitié et culturel, accumulé à travers l’histoire, doit être transmis à la jeunesse par les programmes éducatifs. Malheureusement, les stéréotypes de la "guerre froide" perdurent, alors que depuis la chute du rideau de fer, la menace réelle vient du terrorisme international. Le développement des relations entre la Russie, la France et l’Allemagne est d’une importance majeure sur le plan sécuritaire face à la mondialisation de la menace terroriste. Cependant les discussions sont insuffisantes pour assurer les Droits de l’Homme et les valeurs démocratiques, surtout en Irak et en Tchétchénie, car il faudrait adapter ces valeurs aux autres civilisations, y compris à la civilisation islamique et parallèlement, chercher l’adaptation d’autres civilisations aux normes et standards de la Démocratie européenne.

 

LES MECANISMES INTERNATIONAUX DE LA FORMATION DE L’ESPACE EDUCATIF EUROPEEN

Larissa KONOVALOVA

Chef de la Chaire de l’UNESCO à l’Université d’Etat de Gestion de Russie

 

L’éducation et la culture constituent traditionnellement les voies principales de rapprochement des peuples tandis que la politique les sépare. Le domaine éducatif, culturel et linguistique englobe tout ce qui sert à aider les gens à se comprendre. Mais quelles sont les règles qui régissent la création de l’espace éducatif commun ? L’enseignement a deux vocations dont la première assure la mission éducative tandis que la seconde accomplit des missions sociales et culturelles. Ce qui est surtout discuté en Europe, c’est l’aspect éducatif de l’enseignement.

Au sein de l’ONU, l’UNESCO a élaboré les conventions de recommandations portant sur la reconnaissance des diplômes et des programmes éducatifs. L’UNESCO, en coopération avec le Conseil de l’Europe, a mis à jour la Convention de Lisbonne statuant sur l’égalité des diplômes et des programmes éducatifs sur le marché du travail en Europe, en 1992.L’amélioration dans les estimations d’équivalence des diplômes européens a été l’œuvre de la Déclaration de Bologne signée en Novembre 2003, processus qui a mis en pratique la réforme du système européen dans l’enseignement supérieur, chaque Etat s’engageant à permettre aux titulaires de ses diplômes nationaux d’être plus mobiles et d’acquérir la maîtrise des Langues étrangères.

L’enseignement supérieur en Europe est représenté par trois systèmes complètement différents, français, allemand et anglo-saxon, de plus, leur appartenance statutaire peut être privée ou sous la tutelle de l’Etat, quant aux modes de gestion, ils se situent au niveau fédéral ou au plan des autorités territoriales.

Les difficultés d’adaptation proviennent de ces diversités qui ont provoqué un réel état de choc, lors du séminaire de Salzbourg. L’ONU a donc mis en place une pratique fructueuse associant les organisations non gouvernementales aux manifestations officielles, pour plus d’efficacité. Le processus de la démocratisation se développe en Russie à un rythme accéléré. En 1994, il n’y avait que 12000 organisations non gouvernementales aujourd’hui 700000, dont 14% dans le domaine de l’enseignement. En Europe, la réduction du budget réservé à l’enseignement est constante. Le processus de Bologne est destiné à créer les conditions favorables à la participation de l’Europe au marché international des services éducatifs estimé à 40-50 milliards de dollars.

 

COMMENT RENFORCER LE SENTIMENT D’IDENTITE EUROPEENNE A TRAVERS L’EDUCATION ?

Joanna NOWICKI

Maître de Conférence en Communication Interculturelle
 à l’Université de Marne-La-Vallee, Département Aire Culturelle et Politique

 

Dans son texte "Quel nouvel ethos pour l’Europe ?", Paul RICOEUR associe l’avenir du continent et ses changements institutionnels avec les modifications profondes de la mentalité et de l’imaginaire collectifs résultant de l’ethos des individus, des groupes et des nations. Il propose une classification en quelques modèles d’identité et d’altérité.

1° Le modèle de la traduction : Pour éviter le risque de l’incompréhension, il faut adopter le principe de la traductibilité universelle- habiter chez quelqu’un pour l’accueillir ensuite chez soi.

2° Le modèle d’échanges de souvenirs : Savoir accueillir avec bienveillance la narration de l’autre ayant pourtant des catégories éthiques et spirituelles différentes, pour libérer l’avenir de l’espoir non réalisé, car le passé est un cimetière d’espoirs déçus.

3° Le modèle du pardon : Le pardon est une autre façon de réfléchir sur ce que Mircéa ELIADE a appelé "La terreur de l’Histoire". Il dépasse l’ordre politique car il se situe dans l’ordre de la miséricorde et de la compassion qui relèvent du don. On ne peut cependant remplacer la justice par la miséricorde.

Comment inscrire le nouvel ethos de l’identité européenne dans l’éducation ?

A.M. THIESSE constate «…les nouvelles formes de la vie économiques exigent la constitution d’ensembles plus vastes que les Etats-nations. Or l’identité supranationale de l’UE devient un espace juridique, économique, financier, politique, monétaire : ce n’est pas un espace identitaire."

L’enseignement secondaire doit donc prévoir obligatoirement l’introduction de "modules d’études européennes", encourager l’enseignement des langues institutionnellement ou par la voie associative, ainsi que développer les échanges de longue durée et les stages dans un établissement scolaire ou universitaire étranger. La culture européenne n’existe peut-être pas, mais il existe la culture de l’Europe, composée des forces de chaque culture nationale qui la compose.

 

ACTUALITE DES ECHANGES FRANCO-RUSSES

Daniel VITRY

Directeur des Relations Internationales et de la Coopération au Ministère

de l’Education Nationale, et de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche

 

Le thème du Congrès : Paris-Berlin-Moscou et l’Europe à 25, la Russie et l’européanisation de l’éducation et de la recherche, les échanges franco-russes, l'OCDE, l'UNESCO, est un thème à géométrie du flou. Mais dans quel cadre se situent les relations, s’agissant de l’enseignement supérieur et de la recherche ?

La reconnaissance mutuelle des diplômes fondée sur une formation identique, était le critère utilisé il y a 40 ans, au moment de la création de l’Union Européenne. Il y a 10 ans, c’est le critère de la confiance mutuelle qui est retenu. En 1998-99, à la Sorbonne, à l’occasion de son 800ème anniversaire, des collègues européens ont crée le système LMD qui est en cours de construction : initié à la Sorbonne, il est amélioré à Bologne et à Berlin en novembre dernier. L’idée en est très simple. C’est celle d’une organisation des enseignements en crédits cumulables de telle façon qu’un étudiant puisse circuler et passer d’une université à l’autre comme on le faisait au Moyen-Age : 180 crédits pour définir une licence, plus 120 crédits pour définir un master.

L’OCDE a produit des indicateurs appelés PISA, qui testent le niveau des élèves en Europe et leurs disparités. La France a du elle aussi se poser beaucoup de questions. Pour rapprocher les Français et les Allemands en même temps sur le plan de la langue dont l’enseignement est en perte de vitesse, un manuel franco-allemand d’Histoire est en préparation pour 2005, à l’initiative du Président de la République et du Chancelier. Il pourrait servir d’exemple, par la suite, pour la relation franco-germano-russe.

 

L’EUROPEANISATION DES ENSEIGNEMENTS A SCIENCES PO

François VERILLAUD

Directeur Adjoint et Directeur des Affaires Internationales et des Echanges

à l’Institut d’Etudes Politiques de Paris

 

Les systèmes d’enseignement supérieur, y compris Sciences Po, évoluent dans le contexte d’une grande concurrence internationale. Dans quelle mesure la Russie a-t-elle alors intérêt à "européaniser "son système d'enseignement supérieur ? Le cas de Sciences Po est lié à une européanisation précoce :

1° l’introduction de la dimension européenne s’est faite naturellement dans les sciences économiques et politiques, en droit, en histoire, en sociologie. Les cours en deux langues étrangères différentes de la langue maternelle, se sont substitués aux cours de langues étrangères. Trois facteurs ont facilité l’européanisation de Sciences Po : la pluridisciplinarité des enseignements peu théoriques donc directement liés à la vie politique, économique et administrative, la grande centralisation de Sciences Po.

2° Le programme SOCRATES a permis la création de réseaux d’échanges avec une mobilité de plus de 120 universités européennes et internationales.

3° La recherche d’une meilleure lisibilité des cursus avec la mise en œuvre du 3/5/8 devenu le LMD dès 1999-2000.C’est la recommandation inscrite dans le processus de Bologne avec la création d’un 1er cycle de trois ans dont une année obligatoire à l’étranger suivie d’un master professionnel de deux ans.

L’européanisation est nécessaire mais insuffisante, face à la compétition internationale. Or Sciences PO veut être une institution compétitive au plan international au regard des USA, de la Chine et du Brésil. Ainsi Sciences PO se voit le siège de grandes réformes et d’une démocratisation qui, cependant, ne font pas partie du modèle européen. 

La Russie va-t-elle faire le choix européen exclusif de Sciences PO ? Le processus de Bologne/Sorbonne ne répond que très partiellement aux enjeux de la compétition internationale en matière d’enseignement supérieur. Sciences PO adopte donc une autre politique et développe une coopération intense depuis dix ans avec le MGIMO de Moscou, ce qui a permis de créer un diplôme commun en relations internationales reconnu internationalement. Sciences Po a crée trois premiers cycles délocalisés : Nancy (Franco-Allemand), Dijon (UE élargie-Russie) et Poitiers (UE-Amérique latine).Sciences Po en plus, soutient financièrement l’UER.

 

ENSEIGNEMENT DES LANGUES ET DIVERSITE CULTURELLE EN EUROPE

Max CLAUDET

Secrétaire Général de l’Office Franco-Allemand pour la Jeunesse

 

L’UE vient de s’élargir à l’Europe de l’Est jusqu’alors asservie, faisant naître un vent d’espoir. Cette Union Européenne créée afin de dépasser les conflits et de faciliter la reconstruction, est fondée sur un héritage culturel et historique très ancien mais qui a tendance à se muséifier, car il est davantage tourné vers le passé que vers l’avenir. C’est surtout dans le domaine de la communication linguistique que la perte de la diversité culturelle est préhensible car en dehors de leur langue maternelle, les Européens pratiquent tous la même langue utilitaire qui est l’Anglais. Or la langue anglaise telle qu’elle est pratiquée dans les Institutions Internationales ou dans les rapports quotidiens, n’a plus qu’un lointain rapport avec la langue anglaise parlée à Londres. D’autre part, chaque personne bilingue pourra témoigner qu’elle ne pense pas et ne vit pas de la même façon selon qu’elle parle l’une ou l’autre langue.

L'OFAJ a entrepris de relancer la pluralité linguistique gravement menacée dans toute l’UE. Une langue commune est en effet utile pour subvenir à des besoins fondamentaux mais totalement insuffisante pour les échanges de tout un continent qui, s’il veut garder une place importante dans le monde, devra compter sur le rayonnement de ses chercheurs, de sa vie intellectuelle, de sa culture.

 

LA SOCIETE CIVILE ET LE DEVELOPPEMENT DE LA COOPERATION DANS LE CADRE

DE LA GRANDE EUROPE.

DR Jörg BOHSE.

Président de L’Union des Sociétés Allemandes "Ouest-Est"

 

C’est en visitant le Musée des Décembristes à Irkoutsk, sous le ciel sibérien, où l’on peut entendre la même musique européenne légère de l’époque, celle de Jacques Offenbach, que l’on ressent l’existence d’un grand espace européen, celui de la Grande Europe. Un grand poète géorgien a écrit : 

"La Raison, le Sentiment et la Volonté font un tout…Alors si une personne, manque de raison, elle va tout gâcher." Or l’on peut constater que dans le Colloque d’aujourd’hui, dont le sujet est la concertation commune sur la construction de la Grande Europe, les interlocuteurs des peuples dont les représentants symboliques sont Voltaire et Kant, ont une vision très concrète de ce phénomène, tandis que le peuple dont l’incarnation est Pouchkine aborde ce sujet de manière aussi agréable qu’étrangère, car la Russie n’a jamais connu dans son histoire une période où elle aurait eu la possibilité de résoudre ses problèmes à l’aide de la raison : il s’agit toujours d’un étranger qui le fait à sa place. L’Union des sociétés allemandes regroupe en Allemagne, 84 organisations associatives, dont, sur les 100.000 membres, un vingtième actif est parti à la découverte de la Russie, pendant la Perestroïka, de Brest à Vladivostok et de Mourmansk à Bichkek. Malheureusement, l’enthousiasme des premiers jours s’est un peu éteint et la Russie est moins visitée aujourd’hui.

Les personnes naïves et optimistes, lors des premiers jours de la Perestroïka, pensaient toutes que tout ce qui était mauvais allait disparaître pour céder la place aux bonnes choses. Malheureusement, aujourd’hui, le peuple russe vit un capitalisme qui connaît des problèmes majeurs. Il faut donc que la conception de la coopération des Sociétés Allemandes "Ouest-Est" ayant pour base des hommes enthousiastes et non des hommes d’affaires, envisage le partenariat avec la Russie sur un pied d’égalité : il faut travailler avec nos partenaires, il faut travailler ensemble en faisant en sorte que l’étincelle des enthousiastes dont l’énigme est de pouvoir s’habiliter à aller où bon leur semble et de faire ce qu’ils jugent utile de faire, ne soit pas subordonnée aux bureaucrates qui essayent d’oublier les rêves et les idéaux de leur jeunesse. L’ouverture des frontières est associée à l’hymne de Schengen : "A travers les montagnes, les fleuves et les plaines, le cœur s’envole à la rencontre du voisin. Il détruit les murailles vétustes et les survole à l’aide des chaussures ailées."

 

SAMEDI 5 JUIN 2004 PALAIS DU LUXEMBOURG

 

Ouverture du colloque: CLAUDE ESTIER

Sénateur de Paris, membre de la Commission des Affaires Etrangères, de la Défense et des Forces Armées du Sénat, Président du Groupe Socialiste

 

Il s’agit, en cette seconde journée du Colloque, de voir d’une part, comment peut s’organiser la coopération en matière de sécurité entre Paris, Berlin et Moscou, et d’autre part d’envisager l’avenir des relations économiques et commerciales entre nos trois pays. Il n’est d’ailleurs pas indifférent que le Colloque se tienne à la veille du jour où, pour la première fois, le Chancelier allemand, le Président russe et le Président de la République française vont se trouver côte à côte pour célébrer le 60ème anniversaire du débarquement en Normandie.

 

TROISIEME TABLE RONDE

 

STRATEGIE ET SECURITE : UN AXE MAJEUR DE COOPERATION ENTRE PARIS, BERLIN ET MOSCOU.

Président de séance :HANS-DIETER HEUMANN

Ministre Conseiller, Chef-adjoint du service politique de l’Ambassade

de la République Fédérale d’Allemagne

 

La stratégie et la sécurité sont un axe majeur de la coopération entre les trois pays. La coopération est conçue dans le cadre du trilatéralisme en adoptant une approche plus vaste, celle de la relation de la Russie et de la Communauté Euro-Atlantique en matière de sécurité. Cette Communauté est composée d’une part par l’OTAN et d’autre part par l’Union Européenne qui cherche à jouer un rôle de plus en plus important et dont la relation avec la Russie a acquis une dimension stratégique. Dans une deuxième partie, seront envisagées les nouvelles donnes stratégiques, la sécurité européenne et internationale d’un point de vue militaire. Une situation dont nous connaissons les nouvelles menaces, mais qui est marquée par une incertitude.

 

MULTIPOLARITE CONTRE UNIPOLARITE : LE ROLE DE LA RUSSIE ET DE L’UNION EUROPEENNE

DANS L’ASSURANCE DE LA SECURITE INTERNATIONALE.

Pr Dr Peter SCHULZE

Fondation Friedrich Ebert, Professeur a l’Université de Gottingen

 

Un développement sans conflit sur le continent européen n’est pas une certitude car l’adoption de la Constitution Européenne n’est pas encore établie. D’autre part la guerre en Irak est en rapport direct avec l’établissement d’un nouvel ordre mondial. Une force telle que celle de l’ONU pourrait-elle s’opposer à la politique de domination des Etats-Unis ? La transformation du dialogue international entre les Etats, provient de leur dépendance croissante à des facteurs internes. Le comportement des USA s’explique par les évènements du 11 Septembre 2001 mais aussi par les futures élections avec un changement de paradigme dans la politique extérieure, bien qu’on assiste depuis la présidence de Reagan, au mélange de l’isolationnisme du Parti républicain avec le globalisme du Parti démocrate, antérieurement incompatibles dans la politique internationale des USA. Ainsi, la politique extérieure des USA sera sûrement la même après les Elections Présidentielles, bien que le paradigme officiel soit différent.

Quant à l’UE, ses difficultés identitaires se sont résorbées lors du Sommet de Bruxelles dans l’unanimité de sa position commune sur la situation en Irak, en prenant conscience de la force d’opposition que représentait le triangle Paris-Berlin-Moscou dans les relations internationales face à la politique de domination menée actuellement par les Etats-Unis. Cependant, le projet européen de sécurité est un projet du futur car les dix prochaines années vont être consacrées aux problèmes liés à l’élargissement. Dans ces conditions comment l’UE en perte d’autonomie peut-elle organiser ses relations avec les Etats-Unis qui, d’un côté mènent leur politique de domination unipolaire et de l’autre côté restent toujours un des éléments principaux du système de sécurité en Europe ? Par ailleurs, les relations entre l’UE et la Russie sont celles d’une coopération fondée non seulement sur leur position commune envers la guerre en Irak, mais surtout par leur référence commune au Conseil de Sécurité de l’ONU ainsi qu’aux normes du Droit International pour la résolution des conflits internationaux. La Russie glisse progressivement et irréversiblement à la rencontre de l’Occident en jouant d’ailleurs davantage la carte américaine pour ce rapprochement. En effet, rares sont les initiatives de la part de l’UE pour aller à la rencontre de la Russie, principalement à cause des idées reçues et complètement dépassées, sans tenir compte des processus en cours dans ce pays. C’est pourquoi, la création des quatre espaces cités hier, reste une innovation bureaucratique, car la Russie est entraînée depuis un certain temps dans les processus de la globalisation, et l’intégration n’est pour elle désormais, qu’une des voies possibles de son développement.

La Russie dès aujourd’hui doit avoir la possibilité de participer à tous les projets de la coopération européenne, aux projets économiques, sécuritaires ainsi que dans ceux de l’aérospatial, domaine dans lequel elle a des avantages incontestables. La lutte contre les préjugés idéologiques et politiques se situe aussi au niveau des échanges de la jeunesse : nous devons favoriser la création d’organisations internationales pour la consolidation de nos relations.

 

LA RUSSIE ET LA COMMUNAUTE EURO-ATLANTIQUE.

Isabelle FACON

Chargée de Recherche à la Fondation pour la Recherche Stratégique

 

L’opération militaire de l’OTAN dans les Balkans en 1999 a constitué un tournant dans les relations entre la Russie et la Communauté Euro-Atlantique, en confirmant que l’ordre de sécurité européen centré sur l’OTAN peut annuler la voix de l’opposition de la Russie à une solution militaire impliquant l’OTAN en dehors de l’ONU. Alliance non seulement défensive, mais offensive, l’OTAN minimise les capacités d’autonomie de l’UE ce qui a pour conséquence une prise de conscience plus réaliste de la part des responsables russes vis à vis de la Communauté Euro-Atlantique. Aussi, au lendemain du 11 septembre 2001, en octobre 2001 on voit un renforcement du dialogue russo-européen sur les questions de sécurité et de défense. En Mai 2002, un nouveau Conseil OTAN-Russie, le COR, donne à la Russie une voix égale à celle des membres de l’Alliance sur une dizaine de sujets d’intérêts communs. Dans le cadre de ses coopérations avec l’OTAN ou la PESD, pour la gestion des crises et le maintien de la paix, la Russie demande un référent sur le modèle du COR, les modalités fixées par Bruxelles lui apparaissant comme peu démocratiques et se sentant marginalisée par les problèmes des visas, les problèmes commerciaux et énergétiques, ainsi que par les divergences sur les valeurs communes.

L’un des quatre espaces prioritaires de coopération entre la Russie et l’UE est celui de l’espace de Sécurité extérieure et intérieure. Sont donc inscrits à l’agenda du COR : le désarmement, la prolifération, la gestion des crises, la lutte contre le terrorisme international, contre la criminalité organisée, les migrations illégales, les trafics et réseaux financiers illicites. Les coopérations policières et judiciaires entre la Russie et l’UE ont été engagées bien avant le 11 Septembre : elles sont présentes dans les structures de coopération de la Baltique. En novembre 2003, lors du sommet Russie-UE, un accord a été signé par le Directeur d’EUROPOL Jürgen STORBECK et le Ministre russe des Affaires Etrangères Igor IVANOV, ce qui doit permettre l’échange d’informations stratégiques et techniques et d’officiers de liaison. La Russie développe une mutualisation des coopérations dans le cadre de la CEI et au sein de l’organisation de coopération de Shangaï, en acceptant l’implication de la Chine ainsi que le dépliement des forces occidentales dans les Républiques d’Asie Centrale au lendemain du 11 Septembre.

Cependant l'UE se pose certaines questions : y a-t-il compatibilité entre la coopération que nouent l’UE et la Russie et d’autre part celle développée par Moscou avec la CEI, c’est-à-dire les anciennes républiques de l’ex-union soviétique, ainsi qu’avec la Chine ? La rivalité géopolitique s’accuse dans l’investissement des USA, de l’OTAN et de l'UE dans l’espace ex-soviétique notamment à travers des coopérations militaires en dehors des consultations avec Moscou.

 

L’IDENTITE EUROPEENNE DE DEFENSE ET LA RUSSIE

Youri ROUBINSKY

Directeur du centre d’Etudes Françaises de l’Institut de l’Europe

de l’Académie des Sciences de la Russie.

 

Le processus de la construction par des pays européens-membres de l’OTAN, de leur propre entité militaire autonome de l’OTAN, où règnent unilatéralement les Etats-Unis, a une probabilité d’existence liée à un futur incertain, ce qui donne le ton aux relations du triangle Russie-UE-USA. 

L’idée "d'identité européenne de défense", trouve son origine dans la guerre froide lorsque la sécurité de l’Europe Occidentale, ne voulant pas servir de champs de bataille nucléaire aux deux superpuissances, a été assurée par l’OTAN et son "parapluie nucléaire" contre la menace soviétique.

Les crises de confiance surgissent dès lors que les pays colonisateurs européens demandent le soutien des Etats-Unis en faisant passer les guerres de la conservation de leurs possessions d’outremer, pour le "second front" de la lutte globale anticommuniste : les Américains s’approprient les anciennes sphères d’influence de leurs alliés en leur demandant à leur tour leur aide, sans succès. D’où l’apparition, au début des années 50 du siècle dernier de la CED, Communauté Européenne de Défense, et de la CEE. La communauté du charbon et de l’acier fondée en 1951, fut la base de l’actuelle UE. Cependant le 30 Août 1954, l’Assemblée Nationale refuse de ratifier l’accord de la fondation de la CED : c’est alors que le réarmement de la RFA est opéré grâce à son entrée directe dans l’OTAN et dans l’Union de l’Europe Occidentale inféodée aux forces de l’Alliance. La CED a du mal à se transformer en" défense européenne."

L’attitude de l’URSS était hostile à cette époque envers l’identité européenne de défense : la signature en 1975 de l’Acte final d’Helsinki et de la fondation de l’OSCE avec la participation des USA et du Canada, prouve que les USA et l’URSS étaient à la fois deux rivaux principaux mais aussi deux interlocuteurs privilégiés pour le contrôle de la situation continentale et de l’Allemagne divisée. A la fin des années 80 et au début des années 90, avec l’effondrement de l’URSS et la chute du mur de Berlin, l’"identité européenne de défense "reçoit une forte impulsion avec en 1992 l’accord de Maastricht (PCEP ou PESC ) et en 1997 l’accord d’Amsterdam (PUDDS ou PESD ) Dans la pratique, la création en 1988 de la brigade franco-allemande fut suivie par celle du Corps européen comptant 50000 hommes en 1992 puis de l’Eurofor et de l’Euromafor.

Les 10 et 11 Décembre 1993 au Sommet de l’UE à Helsinki fut prise la décision de créer durant l’année 2003 une force de réaction rapide de 60.000 hommes. Le 19 Juin 1992 la Déclaration de Petersberg (RFA) est acceptée par le conseil de l’UEO et sur la base de l’accord d’Amsterdam de 1997 l’UEO qui n’était qu’un appendice de l’OTAN est intégré aux structures de l’UE qui organise une coopération pour créer de nouveaux modèles d’armement surtout dans le domaine de l’aérospatiale. Cependant la Politique européenne de Défense voit ses force militaires ne décider que des tâches de second ordre en Adriatique ou en Macédoine pendant les conflits de Bosnie et du Kosovo, fait dû à l’opposition des USA assortie d’une dissension interne à l’UE.

Au début des années 90, l’administration de Bill Clinton évite la confrontation ouverte. Cependant en Février 2000, le Ministre de la Défense des USA lance un avertissement selon lequel une organisation autonome militaire des pays européens "affaiblirait les relations transatlantiques ". Le Conseil de l’OTAN décide de créer des forces de réactions rapides multinationales, pratiquement identiques aux forces européennes. L’Europe a donc rétrogradé au deuxième plan dans la liste des priorités américaines en matière de politique extérieure puisque les USA opposent un cycle de restructuration de l’OTAN à la création d’une identité européenne de défense, ayant en plus de ses missions armées, une réaction aux attaques contre les Droits de l’Homme et se présentant comme une alliance au-delà des frontières des pays membres, comme un système global et offensif.

L’Europe Occidentale essaye de persuader les USA que l’identité européenne de Défense était pleinement partie intégrante du processus de rénovation de l’OTAN.La Grande Bretagne avec Tony Blair, déploya les plus grands efforts avec l’appui de la France particulièrement active dans la création d’une structure militaro-politique autonome de l’UE, dont Paris espérait prendre la tête. Trente ans après Charles de Gaulle, son successeur à l’Elysée, Jacques Chirac, fait revenir les représentants français dans le rang des organes dirigeants de l’Alliance. Les 3 et 4 Décembre 1999 à Saint Malo, Tony Blair et Jacques Chirac établissent une déclaration commune sur l’autonomie de défense de l’UE. Le sommet franco-allemand de Toulouse signifie la même volonté d’autonomie ainsi que les sommets du Conseil européen à Vienne, Kehl, Helsinki et Lisbonne dans les années 1999-2001, prenant les décisions constitutives de la PESD.

Après les attentats du 11 Septembre 2001 "la déclaration de guerre au terrorisme international de Georges Bush" n’empêcha pas l’identité européenne de défense de réaffirmer sa position. La participation militaire de l’Europe de l’Ouest en Afghanistan, contre Oussama ben Laden et sa structure Al-Qaïda, fut symbolique C’est la Russie qui a joué un rôle indiscutablement significatif dans la réussite de l’étape militaire de la campagne d’Afghanistan en soutenant la création de bases américaines dans les anciennes républiques soviétiques et en armant les adversaires des Talibans, l’alliance du Nord ouzbeko-tadjik.

L’identité européenne de défense fut durement éprouvée dès le début de la crise irakienne par l’opposition des camps au sein de l’UE mais aussi de l’OTAN, de l’ONU, de l’OCDE, de la PESD avec la France et l’Allemagne d’un côté, la Grande-Bretagne de l’autre qui se solidarisa avec les USA dans un recours unilatéral à la force militaire sans sanction du Conseil de Sécurité de l’ONU.Le Sommet franco-britannique du Touquet, en raison de la célébration du centenaire de "l’Entente cordiale" marqué par la visite à Paris de la Reine Elizabeth II, suivi en Janvier 2003 de la célébration à Paris par le tandem franco-allemand, du 40ème anniversaire du Traité de l’Elysée et enfin la rencontre à Berlin de" la grande troïka"européenne lui permit de reprendre ses efforts de défense autonome qui furent réexaminés en Juin, Septembre et Décembre 2003 lors de trois sommets européens sur l’élargissement et la Constitution européenne.

Le rapport établi au Sommet de Salonique par le Haut représentant de l’UE pour les questions de politique extérieure et de sécurité, Javier Solana aboutissait à ce que, après les actes terroristes du 11 Septembre 2001, le centre de gravité de la PESD soit transféré des "missions de Petersberg"à la lutte contre le terrorisme international, contre la prolifération des ADM et contre les Etats-voyous¨. Javier Solana ayant longtemps occupé le poste de secrétaire général de l’OTAN, le rapprochement de son rapport à la stratégie américaine s’expliquait pleinement. La PESD évolue donc dans le sens d’une double intégration, aussi bien dans l’UE que dans l’OTAN. Les actes terroristes du 11 mars 2004 à Madrid eurent pour effet le retrait des troupes espagnoles d’Irak mais en même temps vivifièrent le processus de coordination des actions antiterroristes des pays européens, donnant ainsi confirmation au "document Solana" ainsi qu’à Washington.

La relation de la Russie envers la PESD dépend des perspectives de la réalisation de l’Identité européenne de défense dans un avenir proche : permettra-t-elle un progrès ultérieur de la Russie dans les sphères de la sécurité avec les structures nord-atlantiques, y compris l’OTAN ? En effet, malgré l’existence du COR, Moscou reste préoccupée par l’élargissement de l’OTAN vers l’est et d’autre part par le rôle peu significatif de la PESD dans les opérations de restauration de la paix. Enfin l’UE doit expliquer son attitude et sa position militaro-politique sur l’étendue post-soviétique, de la Transdniestrie à la Tchétchénie. Un accord a été conclu entre la Russie et l’UE lors du Sommet Russie-UE tenu le 31 Mai 2003 à Saint-Pétersbourg sur la coopération dans la lutte commune contre le terrorisme ainsi que dans le domaine de la défense civile. En fin de compte, la variante actuelle de la PESD peut servir de dé nominateur commun tant à l’égard des Etats-Unis que de la Russie.

 

LA RELATION PARIS-BERLIN-MOSCOU CONSTITUE-T-ELLE UN AXE STRATEGIQUE AU SEIN DE LA NOUVELLE EUROPE ?

Bertrand BESANCENOT

Conseiller diplomatique du ministre de la Défense

 

La relation étroite que la crise irakienne a suscité entre Paris, Berlin et Moscou est-elle l’amorce d’une véritable coopération entre l es trois capitales ? Pour répondre à la question, nous envisagerons trois aspects :

1-Quels sont les fondements du rapprochement ?

La cristallisation de ce rapprochement, au-delà de l’aspect conjoncturel de la crise irakienne, est due au renforcement spectaculaire de la coopération franco-allemande depuis deux ans, véritable locomotive au train de la construction et de l’élargissement de l’UE. Le deuxième élément du rapprochement est lié à la relance de la coopération politique traditionnelle entre la France et la Russie par les Présidents Chirac et Poutine, face à un monde unipolaire, dans une approche multilatérale de la gestion des affaires du monde et de coopération bilatérale complémentaire. L’attraction réciproque qui a toujours existé entre l’Allemagne et la Russie, constitue le troisième élément. La relation franco-russe est un moyen pour la France de préserver sa liberté d’action et donc son dialogue privilégié avec le Sud, tout en étant le moteur de la construction européenne avec l’Allemagne. La Russie cherche à retrouver un rôle de puissance régionale à travers la CEI et internationale à l’ONU.L’Allemagne parachève sa "normalisation" et son "autonomisation" Ce rapprochement permet de desserrer l’étau américain et de préserver un lien entre la Russie et l’UE.

2-Pour autant, est-ce que ce rapprochement constitue l’amorce d’un axe Paris-Berlin-Moscou ?

Il n’existe pas encore de sommet régulier et d’objectif commun institutionnalisant la concertation à trois. Tout en tenant à préserver des relations fortes voire privilégiées avec les Etats-Unis, aucun des trois pays n’envisage de créer un axe opposé aux USA : par prudence face à l’hyper puissance, mais aussi à cause de l’importance du marché américain et surtout de la communauté des valeurs, y compris pour Moscou dont la modernisation a besoin de l’Occident.

3-Quel rôle ce rapprochement peut-il jouer alors dans l’Europe élargie ?

La plupart des pays européens ont une méfiance instinctive à l’égard d’un directoire ou d’un axe des Grands, jugé antidémocratique et contradictoire avec l’ambition d’une construction européenne entre partenaires égaux.

Paris et Berlin sont convaincus que c’est l’intérêt de l’UE d’y arrimer la Russie. Cependant les sensibilités en Europe de l’Est demeurent très fortes. La Russie, de son côté veut promouvoir sa relation avec l’UE et demande la création d’une structure Russie-UE sur le modèle du COR.

En conclusion, le rapprochement entre Paris, Berlin et Moscou n’est pas uniquement conjoncturel, lié à l’affaire irakienne. Il correspond à une concertation entre les trois capitales qui permet de limiter les inconvénients d’un monde unipolaire, tout en considérant comme essentielle pour chacun d’eux, la relation avec Washington. Il peut favoriser un rapprochement entre la Russie et l’UE qui ne pourra cependant être que progressif.

 

TENDANCES GEOPOLITIQUES LOURDES ET CONSEQUENCES POUR LES FORCES TERRESTRES FUTURES

Général BEZACIER

Adjoint doctrine du Commandement de la doctrine et de l’enseignement militaire supérieur de l’armée de terre.

 

Introduction

"La guerre est l’histoire des hommes La paix reste le rêve des sages."Jamais ces propos du Général de Gaulle n’ont été aussi justes en ce début du XXIème siècle où la violence des hommes continue de se déchaîner. La vraie révolution dans les affaires militaires, comme toujours vient du fond des âges par le truchement du comportement moral et physique des hommes. Ces réflexions viennent à l’esprit, lorsque, ayant la charge des affaires, il faut tout de même se forger des convictions et se déterminer à les conduire fermement, à bon terme.

 

I Panorama géopolitique.

L’analyse géopolitique du monde ne peut pas ne pas partir de l’attentat massif du 11Septembre 2001, car cet événement exprime toute la violence et le désordre de notre temps, avec, au-delà de la douleur qu’il crée, une portée symbolique exceptionnelle.

1-       Affaiblissement des Etats avec perte de contrôle de leur territoire.

2-       Radicalisation de la violence sur des victimes civiles.

3-       Diversité, prolifération et dissémination des moyens de destruction (lasers, armes chimiques, biologiques et génétiques).

4-       Comportement unilatéral des puissances confondant leurs intérêts avec ceux du monde, oubliant ce qu’avait dit il y a 2500 ans Thucydide : "De toutes les manifestations de la puissance, la retenue est celle qui impressionne le plus les hommes".

5-       Rapports de forces : Aucune opération militaire, d’envergure même limitée, n’a eu, n’a ou n’aura pour caractéristique une activité strictement de basse ou haute intensité. Toute puissance est limitée et selon le mot de Z.BRZEZINSKI", l’importance cardinale consiste à reconnaître que la capacité de leadership est inversement proportionnelle à la volonté de domination."

 

II-Forces Militaires.

Caractérisons maintenant le rapport "militaire" des forces en présence dans le monde : quel y sera le rôle et la place futurs de nos forces notamment terrestres, dans le cadre d’une armée européenne du XXIème siècle qui sera désormais la nôtre ?

1-Défense du territoire : Un constat s’impose avant tout : le territoire national américain n’est plus désormais hors d’atteinte des agressions extérieures. Le bouclier anti-missiles sera un fait majeur des systèmes de défense du XXIème siècle.

2-Ecart technologique : A ce premier constat et résultat, s’ajoute un second : le différentiel exponentiel et technologique existant entre les arsenaux militaires des USA et ceux des puissances occidentales dont le Japon et la Russie, dans la maîtrise des technologies de l’information notamment.

3-Forces morales : Le rapport des forces morales sera toujours très déterminant. Aujourd’hui encore, des hommes continuent de mourir plus facilement pour des idées que pour des intérêts Or rien n’est plus étranger à nos sociétés hédonistes où nous avons perdu le sens de la force des idées et de leur valeur potentielle.

 

III- Enseignements.

Nous pouvons retenir, de l’évolution des menaces présentées ici, 4 enseignements concernant directement le rôle et la place de nos futures forces dans le système général de notre organisation de défense et de sécurité.

1-Opérations interarmées : Le 1er enseignement fondateur des choix budgétaires pour l’équipement de nos forces, est celui du caractère désormais interarmées de nos opérations militaires. L'Armée française recourt à ses trois composantes, navale, aérienne et terrestre dans le cadre des quatre grandes fonctions opérationnelles du commandement, du renseignement, du soutien logistique, et des communications internes et externes.

2- Adversaires et vulnérabilités : Le 2ème enseignement est que l’on peut affirmer une certitude de notre époque : nous sommes en train d’apprendre à connaître nos adversaires, voire notre ennemi, aussi bien en opérations extérieures que sur le territoire européen. Toutes les missions qui nous sont confiées, visent à rétablir ou établir l’ordre démocratique, la justice, la sécurité des populations et la paix. Face à nos forces européennes, face à nos coalitions de l’Alliance Atlantique, face à notre supériorité technologique, s’opposent les mêmes types d’obstruction armées d’adversaires souvent désespérés, porteurs d’idéologies fortes, pratiquant des actions subversives pour bouleverser et renverser l’ordre et les valeurs universelles. Ce que l’on appelle aujourd’hui conflit asymétrique, n’est rien d’autre que le prix à payer de notre développement. Ces formes de guerre de la part de l’ennemi, se caractérisent par la combinaison d’actions psychologiques ciblées en priorité sur les populations d’un camp ou de l’autre, et d’actions de type et de nature indirects tels que guérilla et terrorisme, y compris dans nos réseaux informatiques.

3-Gagner la paix : Le 3ème enseignement transmis par les maréchaux Liautey et Galliéni est que les armées ne sont plus les acteurs des victoires d’aujourd’hui, elles en sont les indispensables facilitations. La dimension politique l’emportera toujours sur l’aspect strictement militaire. Si la phase d’intervention est" facile" à conduire, celle de la stabilisation est difficile à mener à bien, car elle est l’objectif des actions subversives asymétriques. C’est pourquoi le concept du "first in, first out", doit être rejeté : les opérations extérieures ne peuvent pas être le plus courtes possibles.

4-Imbrication entre civils et militaires : le 4ème enseignement "modélisateur" pour l’armée future est celui de l’imbrication et de l’interaction croissante entre les forces et les populations civiles, amies, neutres ou hostiles, qui sont à l’heure actuelle urbanisées : l’armée ne fera plus campagne, mais la ville.

IV- Coercition et Maîtrise de la violence.

 

Les actions de coercition et de maîtrise de la violence sont les deux modes opératoires pour atteindre les objectifs stratégiques et politiques Ces deux modes sont d’une complémentarité et d’une"auto-nécessité" absolues Maintenir la sécurité d’un territoire implique de contraindre l’adversaire à renoncer à son action y compris en le détruisant si nécessaire par le déploiement de forces puissantes de prévention et de dissuasion. D’autre part, les forces terrestres sont seules capables d’un bon discernement De là découle cette nouvelle façon d’employer la force qui fait appel à trois principes s’ajoutant à ceux du Maréchal Foch : celui de la gradation des effets, celui de la préservation des hommes, et celui permanent, de la légitimité des actions.

 

Une Armée pour la France, pour l’Europe.

L’approche de l’armée du XXIème siècle passe nécessairement par l’Europe puisque depuis décembre 2003 existe un Conseil stratégique de Sécurité de l’UE : "Une Europe sûre dans un monde meilleur"., accompagné par la création d’une entité de 60.000 hommes et de plusieurs groupements de combats de 1.500 hommes chacun. L’armée française du XXIème siècle sera un des moyens majeurs de la Sécurité et de la défense européennes afin de non pas seulement gagner la guerre, mais établir la paix avec ce qui a toujours fait le génie propre de la France et de son armée : sa vision du monde et des rapports entre les pays et les hommes.

 

PROBLEME DE LA SECURITE EUROPEENNE ET INTERNATIONALE

Anatoly MAZOURKEVITCH

Chef de la Direction générale de la coopération internationale militaire du Ministère de la Défense de la Fédération de Russie

 

Face aux nouveaux défis et aux nouvelles menaces internationales, la création d’un système stable de Sécurité Européenne est la priorité commune, permettant aussi de satisfaire les intérêts politiques, économiques et militaires de tous les Etats de la région, y compris ceux du plus grand d’entre eux, la Russie. L’objectif de coopération de la Russie est basé sur les principes du Droit international. , afin de diminuer le rôle du facteur militaire en développant le rôle stabilisateur des moyens politiques dans la prévention et la résolution des crises. La coopération avec les Etats européens doit garantir à la Fédération de Russie un environnement extérieur favorable à son développement social et économique, ainsi qu’à la sécurité et à la prospérité de ses citoyens.

La coopération entre la Russie, la France et l’Allemagne est particulièrement renforcée sur les questions de sécurité au sein du Groupe de travail germano-russe de haut niveau ainsi que dans le Conseil franco-russe de coopération afin d’instaurer un climat de confiance mutuelle, en vue de définir la concertation des actions communes des forces armées dans la lutte contre le terrorisme international, la non-prolifération des armes de destruction massive, la criminalité organisée, le trafic de drogues et d’êtres humains, le blanchiment d’argent criminel et autres. La question du recours à la force militaire, ne peut être résolu, en l’état actuel des choses, que par le renforcement du rôle primordial de l’OTAN et du Droit International. Les relations de la Russie avec ses partenaires européens sont en conformité avec le respect des Droits de l’Homme et des principes de la Démocratie Le futur système de la sécurité européenne doit représenter un processus de l’intégration progressive et de la coopération de toutes les institutions transatlantiques et européennes telles que l’ OSCE et l’UE, l’OTAN, la CEI etc. ainsi que des relations Russie-UE et Russie-OTAN, afin de consolider nos contacts dans le domaine militaire. Un effort a été fait en ce sens à Bruxelles les 19-26 Novembre 2003, mais il reste encore insuffisant.

La coopération entre la Russie et l’UE doit prendre davantage d’ampleur dans le domaine militaire. La coopération de la Russie avec l’OTAN constitue le noyau dur de toutes ses relations avec l’Alliance Atlantique depuis la Déclaration de Rome, il y a deux ans. Sous l’égide du Conseil de Russie-OTAN, nous avons procédé à la création de la base normative et réglementaire de notre coopération qui prend la forme de documents d’encadrement général et de déclarations communes Cependant le 29 mars 2004, un événement remettant en cause l’ensemble des relations européennes et internationales a eu lieu : l’élargissement de l’alliance, s’est déroulé au moment où les pays baltes avaient rejoint l’OTAN sans avoir pu résoudre un grand nombre de problèmes existant dans les relations de ces pays avec la Russie, et sans avoir signé le traité du TFACE, ce qui permettrait à l’Alliance atlantique de créer dans ces pays un groupement de forces armées sans aucune limite, contrairement aux engagements pris par la Russie à Istanbul. Certains membres de l’OTAN perçoivent l’adhésion des pays baltes à l’Alliance, en partant de l’hypothèse qu’une grande guerre en Europe est toujours possible : ce qui explique la construction et les manœuvres des nouveaux sites de l’infrastructure militaire à proximité directe des frontières russes La situation prend la même tournure au sud de l’Europe, en Roumanie et en Bulgarie où il y a déjà des projets d’implantation d’une nouvelle structure de l’OTAN.Or les relations entre l’OTAN et la Russie doivent être basées sur un pied d’égalité, sur le respect des normes du Droit international stipulées dans la Charte de l’ONU, dans l’acte final ‘d'Helsinki et dans la Charte européenne de Sécurité. L’Alliance doit respecter les principes établis dans la Déclaration de Rome, en tenant compte des intérêts nationaux de la Russie, y compris dans le domaine de la sécurité. C’est par la qualité de leur coopération sur un pied d’égalité que l’UE et la Russie parviendront à consolider la stabilité et la sécurité dans les relations internationales.

 

LA PRIORITE DES METHODES DE FORCE DANS LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME INTERNATIONAL,
LE DEVELOPPEMENT DE L’ORDRE MONDIAL CONTEMPORAIN.

Alexandre BELOUSSOV.

Député à la Douma, chef adjoint de la délégation de la Douma chargé des rapports avec l’Union Européenne.

 

 

Le terrorisme international, défi le plus dangereux et incontrôlable de la civilisation humaine, déstabilise le Proche-Orient, l’Europe, la Tchétchénie, et d’autres régions de la planète, au profit économique et politique des forces extrémistes et des idéologues de ce "business" sanglant. La création de la coalition antiterroriste réunissant une centaine d’Etats, fait apparaître une certaine faiblesse du monde civilisé contemporain doté pourtant de la révolution scientifique et technique permanente. Est-il cependant possible d’opérer notre planète, la Terre, du terrorisme international ? Le XXème siècle était sous le signe des ambitions hégémoniques des dictateurs et des guerres mondiales faisant des millions de morts. La conférence de Potsdam mettant un terme à l’étape de domination par l’agression et la guerre, a néanmoins ouvert des horizons à d’autres méthodes de lutte : la guerre froide commençait, avec la création de deux mondes isolés par l’esprit de haine, au bord de la guerre nucléaire, achevé par la chute de l’une des superpuissance, l’Union soviétique. Le monde bipolaire est devenu unipolaire avec l’expansion de la civilisation occidentale ou plutôt américaine, sur le territoire de l’ancien bloc d’Etats socialistes. Ce processus a été appelé globalisation et les opposants ont été appelés anti-globalistes.

Cependant, ce modèle presque affirmé, a été détruit par les évènements tragiques du 11 septembre 2001L Le monde a découvert que les valeurs imposées n’étaient pas toujours partagées par tous. Le terrorisme international a des bases islamistes très solides. Cela n’a pas de lien direct avec cette religion particulière mais s’explique par le fait qu’à partir du plus bas âge, les enfants se voient inoculer les principes et les valeurs qui se sont formées par l’histoire même. Les méthodes de force doivent être ciblées et viser des responsables et des délinquants concrets. Certes personne ne peut exclure que dans le monde de l’Islam on peut trouver des islamistes et des fanatiques qui considèrent "la lutte contre les infidèles "comme la motivation principale de leur vie. Il serait cependant erroné de faire la guerre aux peuples entiers, à la culture ou à une civilisation particulière. Il faut tout d’abord mieux connaître et respecter cette culture, et développer un dialogue avec les forces vives du monde islamique, les aider et les associer à la discussion sur les problèmes d’ordre mondial. L’avenir nous apportera de nouvelles formes d’institutions internationales où de façon équitable seront représentés les intérêts des pays européens, islamiques, asiatiques et autres, et où sur un pied d’égalité seront prises des décisions collectives et s’effectuera leur suivi. Une "coexistence coopérative" est la seule voie qui permettra en pratique de neutraliser la tension existante entre les civilisations. La Russie a été l’une des premières puissances qui ont subi les attaques du terrorisme international. Le monde contemporain a besoin d’une stratégie moderne bien étoffée et progressiste du développement qui serait basé sur les avantages de la paix et non sur l’idéologie de l’hégémonisme mondial.

 

L’AVENIR DES RELATIONS ECONOMIQUES ET COMMERCIALES ENTRE PARIS-BERLIN-MOSCOU

Président de Séance : Antoine de FONT-REAUX

Rédacteur en chef de la Revue parlementaire.

 

La Russie est un pays en transition disposant de ressources naturelles et humaines exceptionnelles qui font de cet espace la plus grande zone de développement économique de la planète. Le taux de croissance de la Russie était en 2003, de 7,3 %, les prévisions tournent autour de 7 à 8 %. En dépit d’efforts certains et de déclarations de bonnes intentions, les investisseurs en Russie sont encore très prudents. Ils sont distancés largement par l’Allemagne. Avec 400 entreprises implantées en Russie, la France occupe la 8ème place mondiale des investissements directs en Russie.

 

LES OPPORTUNITES DU MARCHE RUSSE POUR LES ENTREPRISES FRANÇAISES.

Igor MALCEFF

Conseiller Russie-CEI à la Chambre de commerce et d’industrie de Paris

 

Il y a trois ans, la Russie était un pays invendable, aujourd’hui la Russie occupe la 2ème place parmi les pays demandés En numéro 1, sur le plan mondial, nous avons le marché chinois et ensuite le marché russe. La Russie est un grand continent, 17 millions de kms², c’est 1/7 des terres émergées. Les entreprises françaises se concentrent essentiellement sur les deux plus grandes villes connues : Moscou et Saint-Pétersbourg La véritable étape pour demain est d’aller dans les régions qui se développent fortement, où il y a de grandes opportunités. C’est un marché de 146 millions d’habitants avec une population pour la classe moyenne, d’un niveau de vie suffisamment important pour acheter des produits étrangers, avec un haut niveau d’éducation, un potentiel et des ressources naturelles considérables. En 2002, la Russie a été le pays numéro 1 mondial pour l’exportation d’hydrocarbures, pétrole et gaz. Cependant le niveau de vie reste fortement bas avec d’énormes différences. L’économie est encore insuffisamment diversifiée pour son industrie : la modernisation de l’industrie manque encore d’investissements. Le marché russe devient très concurrentiel. C’est un pays tourné vers l’Union Européenne qui devient le 1er partenaire de la Russie (50 % des importations). Il reste encore des places à prendre pendant 4 ou 5 ans avant que le marché soit saturé. Les exportations françaises, en quatre années, ont passé de 1,8 à 2,8 milliards d’euros. A titre d’exemple, les exportations françaises en Chine sont de 4 milliards d’euros. La faiblesse de la Russie tient dans le fait qu’elle exporte peu de produits finis en Europe et particulièrement en France. On espère que cela changera dans les années à venir, car l’essentiel des investissements est encore à venir, il y a encore beaucoup de projets en cours. Tous les secteurs peuvent être attractifs. De plus en plus, on ne va pas simplement vendre des produits mais vendre des ingénieries techniques et des services, de la coopération et de la formation. Après les années difficiles de 1990, l’industrie russe relève la tête et l’objectif de beaucoup de sociétés est de coopérer avec des sociétés occidentales pour acquérir un savoir-faire, une technologie. A terme, il s’agit pour la Russie de retrouver sa puissance et d’être capable elle-même de produire des biens à haute valeur ajoutée.

La coopération de la France et de la Russie était très forte sur le plan culturel, mais la dimension économique n’était pas forcément la dimension la plus importante. Le marché mondial n’est pas facile. La Russie est un grand pays avec une forte croissance, de surcroît il est européen. Tous ces phénomènes concourent au fait qu’aujourd’hui, les Français sont nettement plus actifs qu’ils ne l’ont été par le passé, en Russie.

 

LA DIMENSION FINANCIERE DE LA COOPERATION ENTRE LA RUSSIE ET LA ZONE EURO.

Jean-Paul DESSERTINE

Président de la Commission CEI des conseillers du commerce extérieur de la France

 

"Dire que sur le plan économique et financier, il y a un axe Paris-Berlin-Moscou serait un abus de langage L’Allemagne et la France réunies représentent moins de 20 % des échanges. En termes d’ investissements, elles représentent encore un peu moins. Il faut donc relativiser cette position, l’Italie s’intercalerait entre la France et l’Allemagne…On devrait plutôt parler de Rome-Berlin-Moscou…"

"…Sur le plan financier, si l’Allemagne est toujours le premier créancier de la Russie, c’est la Chine qui est son premier débiteur. De même pour la France, c’est bien la Chine qui est devenu le premier engagement alors que la Russie n’est qu’au 6 ème ou 7ème rang….L’Allemagne est le premier client de la Russie, la France, le 13ème et l’Italie, le 2ème. Mais 81 % des importations françaises sont énergétiques, 84 % des importations allemandes sont des importations énergétiques et 87 % des importations italiennes sont des importations énergétiques, ENI et RUHR GAZ sont les premiers clients de la Russie…."

"…Les chiffres quant aux exportations énergétiques et aux investissements directs illustrent le risque du développement russe. Le risque serait que la Russie évolue vers une structure de pays rentier ; c’est-à-dire une mono-spécialisation qui freine le développement, une exploitation des ressources naturelles qui absorbe l’essentiel de l’investissement productif …..Puis il y a un blocage de la diversification industrielle puisqu'une monnaie surévaluée favorise les importations. Enfin cela entraîne, malgré l’afflux des devises, un appauvrissement de la population et du chômage, une captation de la rente par la classe dirigeante donc stagnation, et nécessairement dérive autoritaire sur le plan politique pour pouvoir maintenir la stabilité sociale et politique du pays. C’est le modèle algérien."

"Cependant des tendances opposées existent et nous voyons apparaître un certain nombre d’éléments de diversifications industrielles. Une volonté politique se dessine…Nous espérons que ce sera la voie qui sera suivie, elle n’est pas certaine…Mais c’est l’intérêt de l’ Union Européenne de soutenir cette perspective, car rien ne serait plus trompeur que de croire qu’il faut mettre en place avec la Russie un partenariat dans lequel la Russie deviendrait simplement le fournisseur d’énergie et de matières premières aux pays industrialisés de l’ Europe occidentale …Paris et Berlin, s’ils veulent coopérer durablement avec la Russie, doivent pousser vers une stratégie de développement équilibré et diversifié."

 

L’IMPORTANCE STRATEGIQUE DES QUATRE ESPACES.

Alexandre RAHR

Chef des programmes CEI-Russie du centre "Körber "auprès du Conseil de la politique extérieure d’Allemagne

 

L’existence des quatre espaces communs entre la Russie et l’Union européenne est un grand pas sur la voie de la coopération que la dissolution de l’Union soviétique a pu laisser espérer depuis 1991. Ces quatre espaces rendent possibles l’unification de la Russie et de l’Union européenne.

1-       La création d’une zone de libre échange entre la Russie et l’UE, s’est concrétisée par l’adhésion de la Russie à l’OMC.

2-       - L’étape suivante est émise au Bundestag dix jours après le 11 septembre 2001 : le Président Vladimir POUTINE a proposé aux Européens d’unifier les réserves énergétiques de la Russie avec le potentiel économique et financier de l’ UE. Aujourd’hui l’UE est prête à investir en Russie.

3-       L’UE exige de la Russie la fin du monopole existant sur son marché énergétique. L’Occident craint que la Russie puisse utiliser ses producteurs d’énergie comme instrument de pression d’un point de vue politique, notamment en ce qui concerne la Biélorussie.

4-       En Russie, la question du transport est prédominante. Pour traiter des problèmes de l’énergie, du transport et du transfert de technologies militaires et autres, la Russie propose la création d’une structure particulière au niveau des échanges d’information entre la Russie et l’UE, avec le rôle de relais pour intégrer l’Europe.

5-       L’espace commun sécuritaire sera plus difficile à créer. Il est plus important pour la Russie et l’Europe que l’espace économique. La Russie ne souhaite pas laisser organiser, pour l’instant, des opérations de maintien de la paix par l’OTAN sur les zones géographiques de l’ex-URSS. La Biélorussie est contre la participation de l’Occident dans son processus de démocratisation. La création de l’axe Paris-Berlin-Moscou, en outre, inquiète les Etats-Unis.

6-       Dans le cadre de cet espace sécuritaire, sont à envisager la coopération militaire et technologique, le renforcement des frontières, la lutte contre le terrorisme, la coopération des services spéciaux de renseignement en matière de sécurité, avec un régime sans visa en 2006…

7-       Le quatrième espace est humanitaire. Il s’agit de la création d’une civilisation commune. Or les mœurs en Europe et en Russie diffèrent beaucoup.

8-       La politique des quatre espaces doit être institutionnalisée.

9-       La progression de l’OTAN vers l’Est, l’Ukraine, la Géorgie, l’Azerbaïdjan comme membres de l’OTAN, est un objectif réel pour lutter contre le terrorisme dans le sud du continent.

10-    Les Etats-Unis n’apprécient pas la tentative de créer une Europe continentale unifiée par l’euro.

11-    De toute manière nous devons parler de la réintégration de la Russie.

 

 

LES OBJECTIFS DE L’EUROPE DANS LA CONQUETE DE L’ESPACE ET LES PERSPECTIVES DE LA COOPERATION AVEC LA FEDERATION DE RUSSIE

Klaus-Peter LUDWIG

EADS-chef du département des Relations Extérieures, chargé des Relations avec la Russie

 

A la fin des années 60 du siècle dernier, l’Europe a regroupé ses activités spatiales au sein d’une organisation de recherche commune nommée ELDO resp. ESRO qui, dans les années 70, fut suivie par la création de l’ESA dont l’objectif est de promouvoir le développement technique de systèmes spatiaux., dans le cadre d’un programme commun avec les industries nationales. L’UE, en partenariat avec l'ESA, a commencé à utiliser les systèmes spatiaux pour des missions de défense du territoire, ce dont rendent compte à la fois le "Livre blanc", ainsi que le projet de nouvelle constitution européenne qui font état du programme Galileo ainsi que d’autres programmes d’envergure, tels que le système européen de l’environnement, de la sécurité et de la coordination GMES, ainsi que le système technique décrit dans le DDI.La situation financière et budgétaire actuelle de bon nombre de pays européens, contraint aujourd’hui l’ESA et l’UE à inclure dans l’équipe européenne des partenaires internationaux : la CEI et son complexe d’industrie spatiale est un partenaire privilégié de l’ Europe. En effet, la Russie était et reste l’une des nations de pointe en matière spatiale. La Russie exploite actuellement plus de 150 satellites et systèmes spatiaux dans le cosmos à raison de 40 lancements supplémentaires par an. Sur 200 entreprises aéronautiques en Russie, 100 firmes offrent des systèmes complets. L’industrie aéronautique emploie 500.000 personnes. Chaque année 2000 diplômés sortent des 13 écoles supérieures civiles et universités spécialisées. Depuis des années, EADS poursuit un programme de coopération ambitieux avec des organisations et des entreprises de la CEI dont le projet de marque "Eurockot", avec la firme russe "Khrounichev". Ces premiers programmes ont abouti, en mars 2004, à la création d’EADS Russia Ltd.

 

THALES ET LA RUSSIE : ETAT DES RELATIONS ET PERSPECTIVES.

Alla KOUZNETSOVA

Déléguée de Thalès en Russie

 

Thalès est implanté en Fédération de Russie depuis le début des années 1970.Ses activités sont opérationnelles pour le trafic aérien, la gestion informatisée des réseaux énergétiques et le broadcasting. Depuis les années 90 ses activités se sont renforcées dans le domaine de la Défense avec des coopérations dans le domaine des armements. Cependant progressivement, 40% des activités de Thalès se sont réorientées vers les technologies de pointe du civil. En effet, Thalès entend participer au développement technologique de la Russie dans les domaines suivants : le contrôle du trafic aérien, le broadcasting, le domaine énergétique, l’avionique civile, la simulation sur divers avions, la billetique, le document identitaire, la sécurisation des sites, la surveillance des frontières, les systèmes de navigation GPS, la gestion des flottes, la destruction des munitions. L’approche de ces diverses possibilités de l’exploitation de Thalès en est principalement stratégique et pragmatique. Une base industrielle et commerciale élargie va être établie sur la base d’un milliard d’euros dans les années à venir.

 

QUELQUES ASPECTS DU DEVELOPPEMENT DE LA COOPERATION ENTRE LA RUSSIE ET L’EUROPE A 25

Serge KOULIK

Chargé de mission à l’ Administration du Président de la Fédération de Russie.

 

Jusqu’à un passé récent, le mécanisme de la coopération économique entre la Russie et l’Union européenne avait deux défauts principaux, le premier défaut étant provoqué par les divergences de vue sur les intérêts communs de la part des deux partenaires et le second défaut étant lié à l’inefficacité de la signature des accords, compte tenu de la lenteur et des dysfonctionnements de la bureaucratie. C’est pourquoi, la nécessité de la modernisation du mécanisme de la coopération envisagé par Moscou, s’est vu confirmé à Saint-Pétersbourg et à Rome. Le 30 mars dernier, l’assistant du Président russe , M.Serguei  Jastrejembski a été nommé représentant spécial du président de la Russie pour le développement des relations de la Russie avec l’UE, ce qui prouve à quel point ces relations de coopération semblent être intéressantes pour la Russie, d’autant plus que le département du développement de la promotion des relations avec l’UE a été spécialement créé à cet effet. Malheureusement, l’UE n’a toujours pas donné sa réponse. D’autre part, la réalisation de chacun des quatre espaces de coopération avec l’UE, est à la charge de certaines personnes dans la Fédération de Russie Les fonctions de coordination se font par les chefs de gouvernement de la Fédération de Russie .Les autorités européennes ont promis de proposer leurs propres représentants pour tous ces espaces. Après la délégation russe à l’ONU , la représentation russe à Bruxelles est la plus grande délégation auprès d’un organisme international C’est une preuve de l’attention porté à ce problème par la Russie qui continue la réforme des structures de l’Etat par la réduction du personnel dans les interférences de commissions. Les feuilles de route vont être élaborées pour l’organisation des espaces économiques ainsi que des autres espaces en vue de solutions communes.

Il ne faut pas oublier la réalisation des accords de Luxembourg .Le problème des visas, le problème de l’élargissement pour l’économie russe, les problèmes des minorités, ainsi que les problèmes liés à la région de Kaliningrad. doivent faire l’objet de tous nos efforts pour promouvoir une coopération. qui prendrait en compte le concept d’une large Europe.

 

CONCLUSIONS

Sophie FOUACE

Directrice de l’Association "le PONT-NEUF"

 

Après avoir adressé ses sincères remerciements à l’ensemble des participants et des intervenants, Mme Sophie Fouace souhaite un grand succès à Moscou- Paris- Berlin programmé pour 2005.

Que ce soit en termes politiques, dans le domaine de l’éducation, de la sécurité ou de l’économie, des points de convergence ont été mis en valeur révélant la forte capacité de dynamisme de cette coopération ainsi que la volonté , de la part des chefs d’Etat respectifs, de créer des espaces communs en vue de la relation Russie - l’UE..A la veille des cérémonies du débarquement à Arromanches , l’on peut déjà pressentir l’espace euro-atlantique de demain., dans la communion des mêmes valeurs., comme le rappelait le Président Jacques Chirac au Président Poutine lors de sa visite en France en Février 2003, saluant son choix courageux au lendemain de la tragédie du 11 septembre : » Votre pays s’est immédiatement rangé aux côtés des autres démocraties, dans un mouvement naturel de réunification de la famille européenne autour de ses valeurs ».

Mme Sophie Fouace résume les enseignements qui peuvent être tirés de ce débat, sur le plan politique, en matière d’éducation, en matière de sécurité et en matière commerciale. Elle adresse, pour terminer, un clin d’œil à l’attention de Son Excellence Monsieur Vladimir Ivanov qui comptait hier trois évènements importants en France dont la tenue de notre colloque.

 

Général Henri PARIS

Président de DEMOCRATIES

 

Le Général Paris joint ses remerciements aux intervenants, à ceux de Madame Fouace et se félicite de la coopération entre Pont Neuf et Démocraties. Il adresse également ses remerciements au Centre Culturel de Russie à Berlin ainsi qu’au Centre Culturel de Russie à Paris, et plus particulièrement à M. André Ivanov.

La relation trilatérale Paris - Berlin - Moscou est proprement révolutionnaire, surtout dans sa dimension stratégique. La coopération franco-allemande est la clé de voûte de l’Europe qui ne saurait exister sans elle. Son dialogue date d’une cinquantaine d’années .Une chose est capitale : il faut oublier les contentieux. Il en va de même pour les relations franco-russes., les antagonismes séculaires doivent être dépassés au profit de la construction et de la défense européennes basées sur une action volontariste dont l’axe directeur est fourni par la politique et non par l’économie. La coopération spatiale est à l’ordre du jour. ainsi que les débats à l’ONU pour fonder cette relation entre Paris- Berlin- Moscou , relation spéciale en même temps que révolutionnaire.

 

 

 

 

 

 

 

 

                                                                                                                                       Résumé effectué à partir des Actes du Colloque  (142 pages)

                                                                                                                                       A la demande de  « La Lettre de l’ IPSE »,

                                                                                                                                       Publié dans le N°78-Novembre / Décembre 2004.

                                                                                                                          

                                                                                                                                       Par Marie IVANOFF

                                                                                                                                       Professeur certifié de Philosophie

                                                                                                                                       Mise en pages de Marina IVANOFF

                                                                                                                                                        Juin 2004

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